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Trois ans après, le cauchemar des Yazidis d'Irak continue

Maher Chmaytelli   /   2 августа 2017 года

Les Yazidis ont commémoré jeudi le troisième anniversaire de l'assaut lancé dans le nord de l'Irak par les islamistes de l'organisation Etat islamique contre leur communauté, qualifié de génocide par les Nations unies.

Mais si les derniers djihadistes ont été évincés en mai dernier de la région de Sindjar, leur cauchemar est loin de s'être achevé et la plupart des survivants vivent toujours en exil.

Les djihadistes qui ont pris d'assaut le secteur de Sindjar le 3 août 2014 ont tué ou capturé des milliers de Yazidis, une minorité religieuse issue de l'Antiquité jugée impie par l'EI, qui voit dans ses adeptes des adorateurs du diable.

Près de 3.000 femmes et enfants sont toujours en captivité en Syrie, où elles ont été emmenées par l'EI et réduites à l'état d'esclaves sexuels notamment, et le contrôle de la région de Sindjar fait l'objet de luttes entre factions armées rivales soutenues par différentes puissances régionales.

"La blessure des Yazidis saigne encore", dit un homme rencontré lors de la cérémonie de commémoration à laquelle participaient plusieurs milliers de personnes, dans un temple au pied du Mont Sindjar. "Les Kurdes et le gouvernement irakien s'affrontement pour Sindjar, et nous en payons le prix", ajoute-t-il.

A Genève, la Commission d'enquête de l'Onu sur la Syrie a déclaré jeudi que le génocide des Yazidis par l'EI se poursuivait et que le monde s'en détournait.

"Le génocide est toujours en cours et demeure largement ignoré en dépit de l'obligation faite aux Etats d'empêcher et de punir ce crime", a-t-elle indiqué.

"Des milliers d'hommes et d'adolescents yazidis sont toujours portés disparus et le groupe terroriste continue de soumettre en Syrie quelque 3.000 femmes et filles à des violences atroces, y compris des viols et des corrections brutaux et quotidiens."

Les images diffusées à l'été 2014 montrant des Yazidis fuyant l'arrivée des djihadistes, désespérés, avaient pourtant suscité un électrochoc et conduit les Etats-Unis, sur ordre de Barack Obama, à mener leurs premières frappes aériennes contre l'EI en Irak cinq jours après l'attaque de Sindjar.

L'IMPOSSIBLE RETOUR

D'après une étude publiée par le journal de la Public Library of Science, 3.100 Yazidis ont été tués et 6.800 autres capturés dans ces jours du mois d'août 2014.

Trois ans plus tard, la région de Sindjar est un théâtre dangereux où opèrent les peshmergas kurdes d'Irak, des milices chiites soutenues par l'Iran et les séparatistes kurdes de Turquie du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), dont la présence fait du secteur une cible pour la Turquie.

"Les gens ont peur de revenir. La région est devenue une zone de conflit", souligne le général Ashti Kojer, commandant local des forces de police kurdes.

Le complexe environnement politique de la région dissuade en outre les organisations internationales de travailler sur des projets de reconstruction. L'eau doit être acheminée par camion, l'électricité provient de générateurs privés, les écoles sont fermées et l'hôpital le plus proche se trouve à Dohouk, à trois heures de route.

La ville de Sindjar et ses environs abritaient quelque 400.000 Yazidis. Un millier de familles seulement sont revenues.

Dans son discours prononcé lors de la cérémonie, le maire yazidi de Sindjar, Mahma Xelil, a affirmé que l'ancien Premier ministre irakien Nouri al Maliki, qui était au pouvoir à l'été 2014, était responsable de la tragédie pour avoir laissé au moins de juin précédent les djihadistes s'emparer de Mossoul, point de départ de leur expansion territoriale en Irak et en Syrie.

Pour d'autres, ce sont les Kurdes, qui défendaient le secteur, qui auraient abandonné les Yazidis à leur sort en ne résistant pas à la progression des djihadistes.

A Sindjar, Zeido Shammo, un des rares commerçants à être revenu, dit qu'il ne fait plus aucune confiance aux forces locales. "Nous demandons une protection internationale", dit-il.

 
Источник: challenges.fr