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En Irak, l’impossible retour des yézidis

Allan Kaval   /   3 августа 2017 года

Hazim Khidir n’a pas 30 ans, mais il en paraît dix de plus. Comme chaque jour, assis sur un fin matelas de mousse, dans la pénombre d’une pièce aux murs de ciment nus, il attend que les heures s’écoulent jusqu’au soir au rythme soutenu de cigarettes de contrebande allumées l’une après l’autre. La maison qu’il habite n’est pas la sienne et, bien que son exil s’y prolonge, Baadre, la bourgade du Kurdistan irakien où il a trouvé refuge, lui est toujours étrangère. « Nous avons tout perdu il y a trois ans », souffle-t-il, le regard perdu dans le vide, l’esprit plongé dans ses souvenirs muets. « Le temps passe et il n’y a plus d’espoir de retrouver nos anciennes vies. »

Le 3 août 2014, son village a été pris d’assaut par les hommes de l’organisation Etat islamique (EI) en même temps que les autres localités des environs du mont Sinjar, foyer historique des yézidis, une minorité religieuse kurdophone du nord de l’Irak. Moins d’un mois après sa proclamation à Mossoul, le « califat » d’Abou Bakr Al-Baghdadi comptait y prolonger ses conquêtes récentes par une tentative de génocide, rendue possible par le retrait des forces kurdes censées protéger la zone.

Dans le nouvel ordre imposé par les djihadistes, les pratiques religieuses des yézidis, considérées comme polythéistes, les condamnaient à l’annihilation. Maîtres des villages de la plaine, les djihadistes ont organisé le massacre de ceux qui n’avaient pas pu fuir vers la montagne, avant de traiter leurs épouses et leurs enfants comme le butin d’une razzia. Ils seront plus de 6 000 à alimenter le commerce d’esclaves mis en place par l’EI après l’offensive de Sinjar. Si aucun chiffre fiable sur le bilan des tueries n’a été arrêté, le nombre de victimes est estimé à plusieurs milliers.

« J’ai dû racheter ma famille »

Après être parti à temps avec un de ses fils sur les hauteurs du mont Sinjar, Hazim a pu éviter la mort et se réfugier au Kurdistan irakien avec des centaines...

 
Источник: www.lemonde.fr